Adam et Eve, c’est toi et moi
Voyage de noces et plongée aux Seychelles
Un reportage de Carole Lemaitre et Erwan Amice
Du bruit, des mauvaises odeurs, de l’agitation, coups de chariots, pleurs d’enfants…Nous sommes bien dans un aéroport international ! Même la voix suave de l’hôtesse qui nous oriente dans les dédales de Roissy ne parvient pas à me faire oublier que nous avons dû affronter les flots circulatoires, routiers puis humains, avant de parvenir au « Guichet du Rêve » : les Seychelles sont à portée d’ailes !
Je suis mal luné, je l’avoue. Ma dulcinée m’offre son sourire timide, auquel, malgré mon air bougon, je suis sensible. Nous allons découvrir le paradis terrestre, c’est un véritable périple en Terre de Bonheur. Dans quelques heures les turpitudes liées aux préparatifs seront loin…L’enregistrement terminé, le circuit habituel respecté, nous arrivons dans l’antre intermédiaire, le passage obligé entre le rêve auquel nous aspirons et la réalité, l’avion. Dès les premières secondes, nous sommes vraiment embarqués dans cet autre monde : cocotiers, soleil, plages apparaissent en trompe-l’œil sur les parois, tandis que l’équipage constitué de Seychellois parfaitement souriants nous accueille avec une amabilité fort agréable.
Le service est particulièrement chaleureux, alimenté par des interventions légères et parfumées au goût de notre sacro-saint vin français. «Il faut vous détendre !» revient comme un leitmotiv-berceuse dans la bouche du stewart affable voire quasi-paternel. Je me laisse aller et si j’en crois l’air serein et apaisé de ma bien aimée, lovée près de moi, elle est déjà en partance pour la destination enchanteresse…Pourtant, nous n’avons pas encore quitté le sol ! Cela laisse augurer de fort agréables moments durant lesquels le bien-être musellera efficacement les chiennes de tracasseries du quotidien.
Quelques heures plus tard, l’aéroport léché par les flots d’un bleu turquoise apparaît sous la carlingue. Emotion… La porte s’ouvre sur une bonne bouffée légèrement ventée d’air chaud. Bonheur… Nous avons à peine le temps de récupérer nos bagages que le comité d’accueil nous propose de nous emmener au port, où nous attend un bateau rapide. Un cocktail de bienvenue nous permet d’apprécier l’hospitalité, vautrés dans des gros fauteuils dont les pieds sont enracinés dans l’eau vivante et chaude… Ah, gaspation, qu’il est bon de vivre ! Oubliés mon patron, ses discours et ses objectifs, la belle-mère, le poisson rouge névrosé et la tondeuse en panne…
Le bateau nous emmène en une heure sur l’Ile Silhouette. Il s’agit d’une île couverte d’une forêt vierge parcourue de filets d’eau dont l’eau cristalline est délicieuse. Si l’Eden existe, cela ressemble bien à ça, j’en discuterais bien avec son Créateur. De petite taille, puisque mesurant environ 5km de long et large, elle est la plus montagneuse des îles des Seychelles après Mahé. Les 140 habitants fort discrets et d’origines diverses qui la peuplent vivent de la culture du copra, de l’avocat, de la cannelle, du patchouli. Les produits sont proposés aux touristes de l’hôtel qui viendront au contact avant d’apprécier la luxuriance des lieux sur les deux sentiers qui parcourent l’île.
Nous sommes attendus par les responsables du Hilton Seychelles Labriz Resort & Spa 5 * qui nous conduisent à nos chambres. Celles-ci sont l’équivalent de bungalows de 90 m2, donnant accès direct à la plage, à l’ombre des cocotiers, comme il se doit ! « Pince-moi, dis-moi que je rêve ! » Nous avons pourtant les pieds dans le sable doré… Le lit immense offre déjà des perspectives d’étirements félins et langoureux, la salle de bain est d’une simplicité noble et luxueuse. Elle invite à des déambulations interminables devant les miroirs qui nous renvoient un narcissisme de bon aloi, ne nous refusons rien ! Et le must…Une douche extérieure, ouverte sur la flore luxuriante dispense ses petits jets rafraîchissants ! Aïe, aïe, aïe !
Ma bien-aimée me redemande en mariage, ce qui est somme toute bien normal et nous refaisons le monde… Un parfum de création règne en ces lieux où les Dieux ont dû maintes fois se donner rendez-vous…Ma douce se transforme soudain en naïade ou sirène espiègle. Elle disparaît en un clin d’œil hors de la chambre et devient écume des flots ! Son œil brillant réapparaît entre deux vagues. Le sable fin s’incruste dans ma peau, je me sens déjà intégré à cette île à moins que ce ne soit elle qui m’habite…
Le lendemain, la responsable du Centre de Plongée est à l’entrée de l’hôtel et nous présente la structure, bien équipée et parfaitement organisée. La piscine permet les baptêmes en douceur, des cours seront donnés dans un salon avec jolis fauteuils confortables -je me remémore la salle de cours bien humide, sur les tréteaux et des tables improvisées, de ma lointaine jeunesse ! Gasp, le monde change !- le matériel est récent, stocké dans de bonnes conditions et entretenu comme il se doit, pour favoriser les conditions optimales de sécurité. Nous disposons d’ailleurs sur l’île du seul caisson hyperbare des Seychelles avec médecin ou opérateurs opérationnels.
Le baptême approche… Une présentation nous est faite, nous essayons le matériel dans la piscine et nous affinerons nos sensations en milieu naturel dès l’après-midi. Tous mes rêves semblent sur le point d’être satisfaits ! Le Dive Master nous explique comment nous comporter et nous organiser à bord puis nous arrivons dans une baie peu profonde dont l’eau est franchement cristalline. Le moniteur nous guide ensuite dans un univers coloré, aux formes délirantes : myriade de poissons, carangues, perroquets à bosses énormes, raies pastenagues, corail fouet…Après les premières adaptations au milieu et au matériel, nous ne pensons déjà plus qu’à la deuxième immersion !
Nous décidons alors d’enchaîner sur le niveau 1 de plongée, tout en continuant de nous ravir les sens au gré des séances Spa. Celles-ci ont lieu dans des petites structures parfaitement intégrées au site : parfumés, agréables, idéalement calmes, ces lieux sont propices aux massages, à la détente, au bien-être. Nous alternons ainsi, quotidiennement, très paisiblement, les plongées et les séances Spa durant lesquelles nous abandonnons nos corps détendus entre les mains expertes et délicates de nos masseuses.
Les sites de plongée sont situés à proximité de l’île. La vie marine est abondante : murènes, rascasses volantes, barracudas, mérous, petits requins. Le corail fixé sur les patates de granit est habité par des petits crustacés qui tentent aussi l’aventure en découvrant des grottes peuplées de Glass fishs. Peu à peu, la métamorphose opère en nous : nous délaissons définitivement nos soucis pourtant si obsédants pour nous imprégner d’une philosophie autre, empreinte de zénitude et d’harmonie, tant en surface qu’au fond de ces eaux si hospitalières.
Bien plonger mais aussi bien manger et bien boire, forcément ! Nous avons, nous, Français, une réputation à tenir… Six restaurants proposent des mets succulents et variés. Influence chinoise, japonaise, épices indiennes, recettes françaises, convivialité africaine contribuent à nous dépayser et à favoriser un métissage culinaire. Pieuvres, thons, raies sont pêchés et servis, accompagnés de riz et de manioc, agrémentés de noix de muscade et de gingembre… Le calme s’impose ensuite, ouvert sur un ciel ouvert, sur le spectacle des étoiles.
A la fin de cette semaine, l’obtention du diplôme sanctionne notre sage et obéissante réalisation des consignes données : l’univers sous-marin qui nous a été offert est digne d’un comportement exemplaire. Le respect dû aux sites et aux espèces le sera également désormais de toute façon en tous points du globe. Mais ici, nous avons été privilégiés : l’air, le sable, le vent, le soleil, les éléments tous réunis en un seul lieu préservé nous ont ouvert largement les bras d’une plus grande sérénité.
Grâce à ces conditions exceptionnelles, je me sens capable de retrouver Bébert le poisson rouge et ma maudite belle-mère, entre autres réalités terrestres aux tristes manifestations : j’ai ici acquis une ampleur et une appétence inaltérables !
Les Seychelles sont ainsi le lieu idéal pour songer à recréer le monde, ne serait-ce que le sien propre et celui d’une belle histoire d’Amour revigorée.
Carole Lemaitre et Erwan Amice